Conclusions temporaires : chronique d’un échouage annoncé

Echouage annoncé d’une barque fatiguée par le courant, qui commence à se défaire et préfère le repos des rives boueuses à la violence des courants impétueux.
IL DISAIT il est temps de me retirer, d’ailleurs pourquoi en parler ?
Je suis plus attiré par une fadeur reposante que par des performances brillantes. En fait j’ai envie de me dissoudre comme cette barque qui verra peu à peu ses constituants se dissocier les uns des autres, jusqu’à ce que la notion de leur existence même n’ait plus court. Il arrivera un moment ou l’on ne pourra plus la définir que comme du bois pourri.
IL DISAIT j’ai assez ou pas assez peut-être fréquenté la compagnie des hommes pour en voir les limites. La marchandisation des rapports humains me lasse ; l’économie de nos rapports sociaux n’apporte pas une réponse suffisante aux esprits exigeants. En vouloir plus voilà le handicap, finalement avoir une haute idée de soi et pécher par orgueil.
Bien sûr ceci est d’abord une manifestation de dégoût à l’égard de cette société, c’est avant tout un constat discret, un relevé de position de mon voyage sur terre. J’ai souvent cette impression étrange d’ailleurs de n’être que de passage, de n’avoir trouvé aucune famille aucun ami et de n’avoir à compter que sur moi-même. Conséquence d’une suite d’événements, maillon insignifiant d’une chaîne de relations de cause à effet prenant l’apparence de la cohérence mais en fait histoire sans finalité comme un nuage de poussières errant dans le vide sidéral.
Ceci pour dire que l’impression de vide de sens est certainement la plus jouissive, la plus réelle, la plus consciente, c’est la jubilation de se sentir enfin dans le monde, de le toucher du doigt. Je ne suis rien donc je suis tout car disponible totalement. C’est là la plus grande liberté possible, la seule qui ne soit pas source d’attachement.

DISSOLUTION
Donc la barque va glisser le long des berges, ses couleurs déjà diluées vont s’éteindre peu à peu, ses formes vont se dissoudre, ses composants vont se dissocier comme ceux d’un cadavre. Le plus intéressant est de savoir à quel moment ce ne sera plus une barque.
No man’s land entre l’existant et l’inexistant, l’être et le néant.
A la limite de la forme des choses, qu’elle soit sonore, visuelle, auditive ou autre… à quel moment un son sera-il une voix humaine, quel est l’élément infinitésimal qui créée l’être, le point de passage ?
Identité, force de cohésion interne, du même type que le magnétisme ou la gravité, dont le champ d’application est le vivant. Le jour où cette force d’attraction réciproque se rompt le corps se dissout ainsi que l’âme qui en est la sublimation, cette âme, cette vie qui sont sans doute expression pure de la matière, contenus en elle comme l’ordre émerge du chaos, comme l’essence subtile du parfum d’une fleur, comme les probabilités statistiques émergent du hasard pur.
Cette conscience, cette âme, sont ainsi les purs produits d’un phénomène sans importance: l’apparition à un moment donné d’une cohérence matérielle, de la cohésion temporaire de cellules, jusqu’à la dissolution finale que l’on appelle la mort, et lors de laquelle cette essence subtile s’évanouit non pas parce qu’elle meurt mais parce qu’elle n’a jamais existé de manière autonome, tout simplement, et que le corps matériel qui la produit et que l’on croit retrouve sa vraie nature au-delà de son image: un conglomérat anecdotique et accidentel d’autres moins complexes et plus discrets, ainsi de suite jusqu’à l’infiniment petit. Ce sont même ces événements fortuits de l’infinitésimal qui par un effet d’amplification vont déboucher sur la création de bulles de vie, de bulles de conscience.
Ainsi le macroscopique est l’émanation de l’infinitésimal, l’émergence de la conscience est l’émanation de l’existence physique car sans cette conscience qui clamera cette existence ?
Peut-être le cosmos se rêve-t-il en permanence, peut-être ces grumeaux d’existence ne sont-ils là que pour affirmer son existence, peut-être ne sommes-nous là que pour prononcer son nom et par là même le faire exister. Au commencement était le verbe, cela ne voudrait-il pas dire qu’avant le verbe rien n’existait parce que rien n’était là pour le prononcer ?
Idem pour le temps, l’espace, qui n’émergent qu’à un certain niveau de taille de la matière, émanations encore plus subtiles, dimensions relatives.
Un monde d’émanations, voilà où nous vivons, un monde de hasard, d’essences subtiles, de forces de cohésions variables. Un monde de poupées russes, où la brique de base c’est l’énergie pure qui est à l’origine de tout.
Un monde en combinatoires perpétuelles, comme nos sociétés, nos cultures, nos rencontres personnelles.
Un monde de vent et de vagues, profond comme l’océan et insaisissable comme l’eau.
Un monde où remontent les hasards, comme les organismes marins du fond des abysses.
Car ce monde est le fruit du hasard, il s’auto-génère seul en permanence en multipliant les combinaisons.
IL DISAIT
L’avantage de ne pas exister ? ne plus se battre, ne plus souffrir. Devant l’implacable cruauté d’un monde pour qui nous ne sommes rien autant jeter l’éponge, à quoi bon lutter pour tenir dans le courant. Autant se saborder, ce sera pénible mais court, autant ne plus courir pour ne pas tomber, ce sera enfin le repos, autant lâcher prise, ce sera au moins un vrai choix et la seule liberté de l’homme. Devant cet accident qu’est la conscience, devant nos yeux ouverts par hasard alors que nous devrions être aveugles, nous qui voyons des choses que nous ne devrions pas voir, enfants du monde qui ont franchi le seuil de notre caverne, sourds recouvrant l’ouïe par accident, et en tenant compte que cette capacité de voir n’est liée à aucun moyen d’agir ou de changer les choses, la solution n’est-elle pas de s’échapper du fleuve en approchant des berges, en allant s’échouer dans le boues du rivage? la solution n’est-elle pas de se faire la belle en perdant cette conscience, ce regard sur nous-mêmes, en se noyant dans l’oubli, en se collant à l’instant présent comme la mouche au ruban ?
IL DISAIT certes j’ai parfois des sursauts de vie, des élans d’ouverture, parfois quelques raies de lumière troublent mon univers opaque. Parfois je reçois des signaux d’autres êtres, des signaux dans le brouillard. Le plus difficile est d’accepter ma plus grande faiblesse, l’acceptation des rigidités et des contraintes de mon environnement ; là je suis un faible, je le sais. Là je n’ai pas la force de vivre, je le sais. Je pourrais pourtant, j’ai perdu des amis par faiblesse, par incapacité d’être ce que je suis. Ma seule force : connaître ces faiblesses.

Le chemin

c’est dans les vagues du jour répété
qu’il sculpte son œuvre maudite
de sculpteur à sculpté
il imprègne l’argile
il ouvre une bouche au cri de silence
cheminant comme tant d’autres de son espèce
il donne forme à sa misère
et même écrire est difficile
tant sa vie lui a brisé les mains
de sculpteur à sculpté
il imprègne la masse
de son absence confirmée
de son absence confirmée
il ne sait peut-être même plus hurler
tant sa bouche a été murée
il se dit que peut-être
la vie peut venir le chercher
espoirs battus
sentiers coupés
il ouvre son âme au silence
au doute
à l’amertume
il voudrait en finir
mais pieds et poings liés
le temps qui passe l’englue
sur son ruban aphone et gris
le temps le tue
le temps le tue
le temps le tue…
car il faut vivre
quitte à souffrir des moindres maux
quitte à ce que l’amour s’effile
quitte à ce que les mots se vident
du vital à l’inerte!

Sur les rails

nocturne dans une gare de triage

nuit sombre et glaçante
il va au charbon dans la fumée porteuse de mort
l’horizon se dessine au lointain improbable des zones limitrophes
dans sa main calleuse pèse de tout son poids un lourd sabot d’acier froid qui lui glace les os
entre les rails l’homme avance sans âme
sur les rails progresse le lourd wagon chargé de silence sombre
homme et bête unis pour la fusion suprême…

Découverte proto-historique

Les revues scientifiques ont annoncé une découverte qui révolutionne notre perception de l’âge du bronze.

Cet objet, trouvé dans le pot de chambre d’un chef de tribu dans un tumulus authentique, représente un personnage accroupi déféquant, sourire aux lèvres et langue tirée

Il fait l’objet de spéculations multiples: objet cultuel (réponse joker quand on ne sait pas ce que c’est), protection magique contre la constipation, siège pour (très) petite personne, boîte à quelque chose…

On note la présence d’un orifice dans la partie postérieure du personnage, ce qui amène conséquemment et obligatoirement à la question « à quoi sert-il? ».
Un indice peut-être: l’âge du bronze.
Si vous trouvez la solution merci de la partager, le monde de l’archéologie a besoin de vous!
Vous avez la solution? vous aurez droit à une petite récompense en l’envoyant à lautre hat lachutedesanges.com.

Silencio

Témoignage d’un vivant au seuil de la disparition

il était un temps où j’adhérais à “je n’aime pas les hommes mais j’aime le bruit qu’ils font » maintenant j’en suis à “je n’aime pas les hommes ni le bruit qu’ils font » c’est sans doute une grande lassitude qui m’envahit un chemin sans retour sans repentir vaines discussions monologues subis verbiages masturbatoires vide absolu néant total couinements de primates cacophonie stérile acouphènes langagières et logorrhées du néant
TAISEZ VOUS
faces hilares et réjouies des quelques fientes que vous dispensent vos petites vies, que vous chie dessus l’existence
TAISEZ VOUS CINQ MINUTES !
le temps que s’installe un peu de silence
trop bavards trop bruyants trop remuants, saoulants, qui s’insinuent par touts les pores de notre cerveau, insidieux filandreux médicamenteux
TAISEZ VOUS TOUS
et laissez moi un peu me vider me purger chier toute cette merde des mots et ces envies stériles
et toi saleté d’espoir va te faire voir dans le trou du cul du monde lâche moi une fois pour toutes que je puisse en fin me coucher et dormir
DÉFINITIVEMENT

On the road

allongé l’obscurité des camions pourris sur la route
il respire au ralenti allongé dans l’obscurité
voyage long et stade fœtal le monde en implosion
afrique voyage en lui le continent noir comme révélateur
si proche charnel
voyage express la route et les camions la pluie
après des routes sans âme Bordeaux la grise traversée silencieuse puis la descente sur Bayonne qui éclate au soleil!
cour de ferme au soleil caquètement des volatiles qui éclabousse le soleil levant…
au passage une nuit sous un escalier et le lendemain l’odeur de l’urine des sommeils blancs sur des bancs froids sur des remparts glacés étrangeté du décalage quand la journée vire au transparent
l’homme parle odeur du gas-oil puissance sourde du moteur 40 tonnes glissent comme en un rêve Charon te mène à ta découverte
c’est la descente immaculée c’est vers le fond de soi
sur la route gît la vieille gangue incrustée de scories
sur la route l’avant devient l’après
l’habitude a passé la main
traverse des pyrénées dans la chair de la brume étouffant le monde
d’espagne en andalousie royaume de l’astre jaune
les rires chauds et les pleurs de sang de la liberté en lutte
la misère et la gloire
charnière limitrophe de l’autre monde
odeurs fébriles de la terre ocre odeurs de chair sèche et de peau fumée
parfums d’épices non volatils épanouis dans la fange
le monde révélant ses charnels secrets
la femme est voilée l’homme est glabre ils sont odeurs de cuir et de musc
sans transitions
ils sont de la terre où ils vivent
et le nouvel homme qui arrive souffre d’absence et d’opacité
vérité dans la position couchée dans l’arrêt des fonctions premières pour atteindre enfin au présent de toujours à l’état solide
mémoire d’un moment éternel couché dans la saumure d’un silence absolu

Avant-dernières nouvelles de l’homme

Lieu et date :Pol’N,, rue des Olivettes, Nantes, November 7th at 6 pm to 8th at 6 pm.

Constat 1 :les reliefs d’un repas.

Crédit photos © Hervé Marchand

Constat 2 :une couverture de survie

Constat 3 :un mannequin

mannequin

Constat 4 :une fumée

fumee

Constat 5 :un flyer

avant-derniers...

Hypothèse de travail :
Dans les assiettes et dans les plats subsistent des restes d’icônes, reliefs d’un monde en voie de disparition.
Le drame a eu lieu, les convives se sont évanouis, les traces du Grand Festin témoignent. Subsistance des subsistances, vanité des vanités, silence sépulcral, apaisement final après de vaines agitations.
Sans doute l’œuvre d’un commando artistique non structuré et d’autant plus difficile à appréhender. Des informateurs nous signalent une possible réitération sous un autre forme et un autre prétexte. A surveiller de près…

Ceci est une interprétation personnelle, elle n’engage que l’auteur de cet article

Une perle sur France-Bleu Loire Océan

Une perle sur France-Bleu Loire Océan

urgo

Entendu sur France Bleu Loire Océan :
Jacques Dépont, expert international des musiques actuelles, passées et à venir, grand plongeur de l’océan musical, nous livre une nouvelle perle du plus haut niveau dans son émission du 01/04/2015 de 18h50 à 19h…
Jacques Lapierre, un grand génie ignoré de plus.
Gageons que le standart a été débordé par les appels frénétiques des auditrices enflammées.
Tout le monde se lève pour Jacques Lapierre et Jacques Dépont !

ECOUTER L’EMISSION

Vu à la radio


Si vous souhaitez des précisions sur les circonstances,  lieux et dates des événements d’importance historique évoqués un seul contact:
lautre ========> [hat] ==========> lachutedesanges.com
On dit quoi? On dit merci les Jacques !